Ce samedi matin de janvier, ma mère m’attend à la sortie de
l’école. Comme les autres jours, nous remontons la rue des Boulangers
mais, au lieu de nous arrêter au carrefour, nous prenons à gauche dans
la rue Monge. Je me retourne et aperçois un camion de déménagement garé
en bas de notre immeuble. Ma mère serre ma main dans la sienne. Je n’ai
pas envie de parler, je pense au camion, aux cartons, au salon qui
demain sera à moitié vide. Je pense à mon père. Désormais, j’irai chez
lui tous les mercredis soir et un week-end sur deux. Ma mère s’est
organisée pour que je passe l’après-midi et la nuit chez une amie. Avant
de partir, elle me dit Profite bien de ta journée, amuse-toi, essaye de penser à autre chose. Je hoche la tête mais je sais que jamais plus je ne penserai à autre chose.
Sophie Lemp, Leur séparation