L’homme naît
inachevé, il est jeté dans le monde parce qu’il y entre inachevé,
il s’y retrouve comme assiégé. Il doit donc secréter la culture
comme une carapace défensive et cet inachèvement constitue la base
anthropologique de la pensée dialectique. (Lapassade dit que « la
prématuration biologique de l’enfant crée davantage que la
fixation durable aux premiers objets d’amour, cette prématuration
est source d’un besoin de fusion inassouvi ». ) En effet
« jeté dans le monde », l’enfant y constitue une
totalité inachevée, incomplète, une nostalgie ou si on veut une
intention de la totalité qui tend à se compléter et à se rendre
autonome mais qui n’y arrivera qu’aux prix d’un effort. Cet
effort de totalisation est l’ébauche de la praxis. La dialectique
se définit comme une logique de l’inachèvement.
Joseph Gabel,
Anthropologie et dialectique