Rien de pire que le
cortège des angoisses et de la mélancolie car qui charrie ce gouffre en lui inspire la
peur à qui se porte bien. Pestiféré invisible, il suscite la
fuite. Vieux réflexe animal : qui ne recule quand un fossé se
révèle ? Rien de moins séduisant, de moins agréable que cet être
là. Donne-t-il le change, masqué d'enthousiasme, que ses ondes
voraces figent celui qui veut vivre. Pourquoi blâmer le vivant qui
s'enfuit ? Seuls les chamanes et les sorciers sont immunisés
contre une bile de ce tonneau là. Grand infréquentable, le
mélancolique inquiète, en miroir fou de la lucidité. Poids mort,
c'est le morne répétiteur de vérités qu'il faut oublier. C'est
l'âme noire, la flammèche de notre fragilité, l'incarnation de ce
que nous voulons oublier de notre destin. C'est le corps gris de
notre impuissance, le réflexe panique de qui cogne le noyé. C'est
l'habitant du lac mort, des rochers que nulle gravure n'entame sur
cette grève à la marée pétrifiée. Rien de moins attirant que
cette impuissance là, cet effarement indigne, ce pelotonnement
tremblotant autour de l'étincelle d'espoir. Vortex grisâtre,
vampire passif, étoile morte, il a beau lutter pour épargner ses
victimes, sa présence est un poids de panique autour de la nuque
d'autrui. Ultime locataire de la solitude, il est l'orphelin de
l'élan.
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