mardi 9 janvier 2018

Au service de Mammon




Dans son article concernant le projet de loi macronien sur les « fake news », Frédéric Lordon analyse cette nouvelle, et délétère, pantalonnade du président des riches. Si le style du papier est parfois âprement contourné, Lordon n'en analyse pas moins avec acuité les moeurs de nos maîtres, et de leurs stipendiés, dans ce pays du mensonge déconcertant.

« Car il devient de plus en plus difficile de se déclarer soldat de la vérité. L’enrôlement plus ou moins crapoteux au service du grand capital numérique n’était déjà pas bien glorieux – on ne s’était d’ailleurs pas trop précipité pour faire la publicité de ces collaborations. On apprend en effet depuis peu que bon nombre de rédactions touchent de Google et Facebook pour mettre à disposition des équipes de journalistes-rectificateurs aidant à purger les tuyaux. Il faut vraiment que l’argent manque pour accepter ainsi de se transformer en égoutiers de l’Internet pour le compte des Compagnies des Eaux qui prospèrent en surface. Bien sûr ça n’est pas de cette manière qu’on présente les choses, cependant même ré-enjolivée en cause commune de la vérité démocratique, l’association normalisatrice avec les grossiums de la donnée produit déjà un effet bizarre.

Il faut sans doute être un Décodeur, ou en l’occurrence un Désintoxicateur (Libération), pour se promener dans cet environnement en toute innocence, et même casser le morceau avec une parfaite candeur : « Nous, par exemple, on travaille pour Facebook, comme un certain nombre de médias en France travaillent pour Facebook et rémunérés par Facebook pour faire le ménage dans les contenus qui circulent », déclare Cédric Mathiot avec une complète absence de malice – on voit très bien Hubert Beuve-Méry ou Sartre envisageant de « faire le ménage dans les contenus » en compagnie d’IBM ou de (la nommée avec préscience) Control Data Corporation. »


(Petit) monde




« Quand des journalistes m’emmerdent, je prends une participation dans leur canard et ensuite ils me foutent la paix ».

Propos de Xavier Niel, co-propriétaire du Monde, rapporté par Odile Benyahia-Kouider dans Un si petit monde, Fayard, 2011.